Le jardin que j'ai re-découvert quelques jours plus tard, en visitant le donjon de Loches, n'a rien à voir avec le jardin atlantique, ne serait-ce que du point de vue des dimensions. Modeste en taille, il s'adresse plutôt à l'intellect, à l'odorat, de plus en plus rarement sollicité, et à une marche attentive. C'est un soulagement de se retrouver dans cet endroit calme et sincère après avoir entendu parler de prisonniers retenus dans des cages ou ayant été torturés selon tel ou tel supplice sadique. De plus, pendant que les touristes attendent leur tour pour monter des escaliers en colimaçon et pour avoir le vertige au sommet de la tour principale, je suis seule avec deux amis à profiter du jardin d'inspiration médiévale, une création de 1997, en toute tranquillité.
Mais de quoi s'agit-il exactement ? Marie-Thérèse Gousset y consacre quatre pages dans son livre Jardins médiévaux en France paru en 2010 aux éditions Ouest-France. Vendu au guichet, il nous permet de mieux apprécier l'endroit, qu'aucun panneau explicatif ne met en valeur (à moins que je ne l'aie raté). Situé au pied du donjon, d'une hauteur de 36 mètres, il est organisé comme suit : imaginez un plan rectangulaire avec, sur les côtés, des arbres fruitiers cultivés en espaliers ou maintenus par des structures en bois et, au centre, deux pergolas en enfilade séparées de quelques mètres par un petit bassin de forme carré et entourées chacune de quatre carrés cultivés.
Le visiteur est introduit vers ce charmant jardin par une allée pavée amorcée par des haies couvertes de lierre, divisant le gazon en deux parties. A notre droite, contre la muraille a été aménagée une banquette d'herbe surmontée d'une pergola de vignes. Ce premier espace est séparé du second par un treillis d'osier vif qui forme des losanges. Chaque carré cultivé est délimité par un ouvrage en plessis, c'est-à-dire un petit assemblage de branches de bois entrelacées maintenu ici par des piquets (est-ce du châtaignier ?). Ils contiennent diverses plantes médicinales, potagères, tinctoriales et autres dont le nom est indiqué sur de petites ardoises bien mises en évidence. J'aperçois tout contre la terre de fins tuyaux placés en parallèle qui assurent sans doute l'arrosage des planches. Leur couleur rouille assure heureusement leur discrétion.
Que fait-on dans ce jardin ? Eh bien par exemple, je frotte mes doigts contre de la sauge et en respire l'odeur formidable, je mange quelques mûres qui poussent contre les murs et je fronce le nez à cause de leur goût acide, je me souviens de l'année passée, lorsqu'une bonne soeur avait ramassé une poire pour la manger (sans aucun scrupule !). J'essaie de retenir les noms de plantes que je lis sur les ardoises : verge d'or, absinthe, arnica, pimprenelle, gaude, digitale jaune...Ce qui est drôle, ce sont les troncs entortillés autour des pieds des pergolas, qui sont abondamment recouvertes de glycine et de houblon. Et j'admire tous ces beaux ouvrages en bois qui donnent au jardin son air simplement authentique, bien construit et chaleureux. Seul le bassin m'a un peu déçu puisqu'il était vide. Ne restait plus qu'à faire l'équilibriste sur sa margelle assez large pour accueillir le pied d'un enfant. Notons encore que ce bassin est entouré de quatre plates-bandes de gazon en forme de "L" qui soulignent l'importance de la forme carrée, symbole du terrestre (très bien, mais où se trouve le correspondant céleste dans tout ça ?).
Et ce n'est pas tout, après avoir abondamment profité de cet adorable jardin autour duquel les murailles du donjon servent d'écrin minéral puissant (Marie-Thésère Gousset fait une réflexion similaire), mais non trop accablant, j'ai la chance de découvrir depuis une baie de la tour, qu'il est possible d'avoir une vue d'ensemble du jardin !
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