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Pérégrinations dans les parcs de Paris

C'était il y a déjà plus d'une semaine, lors d'un long weekend à Paris, pour le mariage de deux êtres charmants. Le thème de mon séjour était la découverte des parcs et jardins d'une ville que je croyais faiblement pourvue à ce niveau là. Je dis ça parce que plusieurs personnes m'ont déjà fait la remarque que Bruxelles, par contre,...Le vendredi, j'ai commencé par le Jardin du Luxembourg. J'ai pris le métro jusqu'à Saint-Germain-des-Près et marché jusqu'au théâtre de l'Odéon, celui-ci dissimulant les voies menant au parc. L'entrée que j'emprunte me mène sur l'un des côtés du palais Renaissance, désormais investi par le Sénat. A ma gauche, se photographie obligatoirement le bassin de Marie de Médicis, lequel n'est pas à sa place d'origine et devait servir à clore une perspective à trente mètres de notre position. En arrière-plan, s'élève une sorte d'arc de triomphe ou portique sculpté mettant en évidence un personnage de la mythologie grecque. Ce premier arrêt a quelque chose de très romantique, avec les quelques arbres qui ombragent la scène, les vases fleuris qui bordent le bassin... Entre la grille et ce bassin est aménagé un jardin irrégulier basique, gazon, allées sinueuses et sculptures récentes. Il est néanmoins clôturé par de plantureuses guirlandes de lierre formant des motifs de coeur, légèrement relâchés cela dit. Il faut faire gaffe lorsqu'on chemine sur les grandes allées, les jardiniers passent régulièrement avec leurs petites camionnettes pour se rendre d'un coin à l'autre du parc. Plus loin, à l'avant du palais, l'allée s'ouvre soudainement sur un espace immense et très vivant. Tout autour d'un grand bassin d'eau, les gens sont installés à leur aise et lisent leur journal, font leur devoir en retard, bronzent tout ce qui est possible. On dirait bien que dès qu'il y a du soleil, tout le monde se rue dans les espaces verts pour assurer sa dose de vitamine D. Ci et là, des palmiers vigoureux et autres plantes en bac (des orangers ?), des parterres de gazon bordés de fleurs de couleurs vives et variées, à la façon des mixed borders, qui ressortent particulièrement de ce paysage néanmoins aride. En hauteur, justifiant la présence de glacis, le parc se développe sur des terrasses, qui permettent d'admirer les parterres au niveau inférieur et la totalité du palais, tout comme le spectacle qui se déroule près du bassin. Des statues de reines et autres femmes de l'Ancien Régime français se dressent solennellement le long de la balustrade. On les croirait en train de surveiller le promeneur, sans émotions. Si l'on s'éloigne, on rencontre divers terrains propices aux jeux de boules, tennis, basket...Un jardin réservé aux enfants, très fleuri et proposant des bacs à sable, fait face à l'orangerie. Ces terrasses de divertissement sont abondamment plantées, de manière régulière, et contournent les parterres centraux en arc de cercle. Au loin, dans l'axe du palais, se déploient des couloirs d'ifs taillés en topiaire. Autour du parc, on aperçoit de temps à autre les toitures typiques des demeures parisiennes qui tranchent avec l'usage de la pierre blanche pour les façades. 

Le jardin du Luxembourg.





L'après-midi est consacré, après une étape dans une librairie de seconde main bien connue et dans une boulangerie de quartier pour le dîner, à une visite du Musée Rodin. Le jardin du château de Meudon est bien caché, on ne devine rien depuis la rue de la Varenne. La propriété a appartenu à des personnalités et institutions fort variées entre le XVIIIe siècle et le début du XXe siècle. Le dernier habitant, Rodin, était fort sensible à l'allure des jardins qu'il pouvait contempler depuis le rez-de-chaussée du château. Aujourd'hui, ses oeuvres sont exposées autant à l'intérieur qu'à l'extérieur, et le jardin sert aussi à abriter celles d'autres artistes. Dans la cour du château a été aménagée une roseraie, peuplée d'imposants ifs taillés en cône. Un passage latéral permet d'accéder au jardin, à l'arrière. Il s'agit d'un gazon très étendu bordé de chaque côté par une promenade sinueuse et rafraîchissante entre plusieurs îlots plantés irrigués par de fins canaux et menant, en bout de course, à un petit bassin circulaire. On dirait des rubans de dentelle cousus sur une blouse toute simple. Au fond se déploie un grand bassin séparé d'une pelouse par une arcade végétale. Sur les côtés, le terrain est planté d'arbres entre lesquels sont érigés des sculptures de Rodin représentant bien souvent des personnalités de son époque. Une fois à l'intérieur du château, depuis le premier étage, par la grande baie ouverte à cet effet, m'était donnée une très belle vue d'ensemble du jardin, modeste et noble à la fois. Ce jardin joue beaucoup plus sur le côté doux et intime que le jardin du Luxembourg, prêt pour la parade. Au Musée Rodin, du haut, le jardin a l'air simple alors que lorsqu'on le parcoure, il réserve quelques surprises et vues intéressantes.

Le jardin du Musée Rodin, entre plaisir et intellect...











Pour rejoindre le centre Georges Pompidou près duquel j'ai donné rendez-vous à une amie parisienne, je longe la Seine et remonte dans le jardin des Tuileries, qui fut le premier jardin ouvert au public. Cela se produisit sous le règne de Louis XIII. La rumeur court que le jardin a perdu de sa superbe. Et le palais qui justifiait son aménagement n'existe plus. Autant voire plus fréquenté que le jardin du Luxembourg, cela n'empêche personne de trouver un coin à l'ombre pour s'offrir un moment lecture bien mérité. C'est ainsi que je me suis retrouvée le long d'un parterre boisé avec un gros tronc d'arbre posé en plein milieu. Vers le Louvre, les vues alentours sont superbes, plutôt bien dégagées. 

Le jardin des Tuileries : on y passe ou on s'y prélasse, c'est selon.




La visite des parcs et jardins de Paris se poursuit le dimanche matin. Je prends le métro jusqu'à la station Jussiau, ou Jussieux ?, pour arriver très rapidement au jardin des Plantes. J'avais émis des réserves quant au choix de cette visite, parce que ce type de jardin m'évoquait un ensemble d'aménagements sans justification historique, sans lien avec un contexte, par exemple architectural. Pourtant, il y a bel et bien une raison d'être à ce jardin, et une histoire à ce site. J'ai en particulier arpenté le jardin botanique, le jardin à la française et la roseraie. Le jardin alpin et le jardin écologique étaient semble-t-il fermés au public, dommage pour le premier, ça aurait été mon premier du genre. Ce n'est pas grave, même si ça fait moins exotique, le jardin botanique c'est quelque chose aussi. La structure a beau être répétitive dans ce grand enclos rectangulaire, un léger côté sinueux dans l'agencement des planches de culture combiné à une grande variété de type de plantes, le fait d'être parfois ralenti dans sa progression par des plantes envahissantes et par des panneaux didactiques, voire la contemplation d'une grenouille qui émerge d'un bassin (attention, il paraît qu'ils sont très profonds, mine de rien), font durer la promenade. J'éprouve un grand respect pour ce jardin, où sont rappelé les noms de grands savants qui ont oeuvré dans le sens d'une meilleure classification des plantes. Non je n'ai pas cité Linné, non. De zig-zag en zig-zag, je me rapprochais d'une énorme serre censée abriter des bananiers. Cela dit, je ne suis pas entrée, j'ai pris le chemin du jardin dit "à la française" ou celui des "carrés de la perspective", qui expose au promeneur de nombreuses plantes, dont certaines m'ont paru très exotiques. Devant soi, on a toujours bien en vue ce grand bâtiment blanc consacré à la zoologie. Sur les côtés, se dressent des platanes taillés avec brio. Une femme qui arrive derrière moi me clame son amour pour cette partie du parc, visiblement elle l'adore et elle vient souvent. Très franchement, je n'ai pas tout vu ni tout compris de ce jardin, ça faisait du bien de se promener dans des allées dédiées à la flânerie, sachant qu'il y a quelques minutes, j'étais aux prises avec une horde de joggeurs de tous âges et toutes conditions. Buffon me salue depuis son socle au passage, je m'engage dans un jardin latéral, la roseraie, qui longe la Galerie de l'Evolution. Je passe plusieurs fois sous des arches et devant des roches exposées sur des socles. Les roses, qui se déclinent en plusieurs variétés, croissent aussi différemment, certaines sont grimpantes, d'autres non.


Le Jardin des Plantes.








Ce jour là, je suivais en réalité tout un itinéraire dans Paris sur base d'un livre très sympa dont je vous donnerais la référence si vous me la demandez. Cela m'a mené à la Salpêtrière et son fameux hôpital, la Bibliothèque nationale de France et le parc de Bercy. Celui-ci est surprenant, surtout que je suis tombée en plein rassemblement sur le thème du Manga. Malheureusement, je n'ai pas pu faire de photos de ce parc si plein de vie, avec tous ces gens pique-niquant, déjeunant sur l'herbe, devrais-je dire, cette jeunesse ayant trouvé là son point de ralliement le plus branché. Si j'avais un parc comme ça près de chez moi, j'y serais toujours fourrée. Il offre plein de cadres différents permettant de vivre des émotions, de jouer des rôles variés. Ce qui est incroyable, c'est qu'après une telle journée, j'ai encore eu le temps d'explorer le Marais et ses jardins cachés, que je suis retournée photographier le lendemain matin. Un ensemble de jardins est effectivement accessible depuis un passage latéral de la colonnade qui enserre la cour de l'hôtel de Soubise, qui renferme les archives nationales du pays. Les jardins communiquent avec des hôtels particuliers et sont d'esprit XIXe siècle. Tôt au matin, quelques asiatiques profitent du calme pour méditer en ces lieux, les autres traversent les jardins pour se rendre à leur boulot. Là, un bassin et un petit cours d'eau sinueux, un banc près d'un visage en pierre, pensif, là-bas des cabinets ou gloriettes en treillis métallique, plus loin des plantes tinctoriales et des pièces de gazon. A angle droit, un étroit couloir de haies avec des bancs, puis un immense parterre devant un hôtel particulier qui fonctionnait auparavant avec l'hôtel de Soubise et appelé "hôtel de Rohan". Après une pause chocolat chaud, je prends le métro jusqu'aux Buttes de Chaumont, dans on me vente les mérites assez souvent. Je me vois pourtant obligée d'être sincère : j'ai été à l'essentiel afin de quitter ces lieux le plus rapidement possible. Datant du Second Empire, ce parc situé un peu à l'écart de la vie trépidante du Paris touristique a été aménagé à la place d'anciennes carrières de gypse, justifiant des dénivelés important. Certes, Adolphe Alphand a mis le paquet pour rendre cet endroit impressionnant voire majestueux, avec une cascade récemment restaurée, des ponts suspendus et un belvédère imitant un temple grec de plan circulaire, élevé au sommet d'une butte artificielle par un certain Davioud, vue intéressante sur la ville. Adolphe Alphand, ingénieur des Ponts et Chaussées et directeur du Service des promenades et des plantations, a contribué autant qu'Haussmann a donner un nouveau visage à Paris, sous Napoléon III. Il est notamment l'auteur d'un ouvrage important, Les promenades de Paris. Son oeuvre paysagère et littéraire a fait l'objet ces derniers temps d'un grand intérêt, avec une certaine culpabilité d'ailleurs puisqu'elle aurait dû être étudiée bien plus tôt. Je me sens coupable moi aussi, mais surtout de ne pas avoir aimé cette promenade pourtant incontournable. Ce doit être parce que je recherche plus un jardin romantique et douillet qu'une promenade verte, avec des allées très larges, beaucoup d'arbres, des coteaux herbeux utiles pour bronzer, et puis des vues qui ne varient pas tant que ça et la difficulté de choisir le chemin à emprunter. Pourtant j'admets que le tout a quelque chose de grandiose, en particulier grâce au son de la cascade, que je tentais d'apercevoir. Bref, pour ne pas finir avec une fausse note en ce qui me concerne, je suis allée voir le Parc Monceau, qui n'est pas tout près, et ne m'a pas non plus passionnée, même s'il a une histoire lui aussi. Notre Monsieur Alphand est de nouveau impliqué dans l'histoire, ayant repris le parc du XVIIIe vers 1860, alors qu'il avait été délaissé un certain temps, pour proposer l'aménagement que nous connaissons aujourd'hui. L'ensemble est parsemé de fabriques amusantes, à la manière des jardins pittoresques à l'anglaise, et faisant écho à des périodes de l'histoire très variées. Le tout est entouré d'habitations prestigieuses, peuplé de sculptures, dont une de Chopin, et d'enfants accompagnés se dégourdissant les jambes, ce qui ne forme toujours qu'une toute petite partie de la population présente sur les lieux. Encore une fois, l'offre en terme de places assises est impressionnante et bienvenue.


De petits jardins dans le Marais.



Un simili-temple aux Buttes-Chaumont.

Le Parc Monceau, ses curiosités et ses bancs.


Bibliographie :
Michel Racine e.a., Le guide des jardins de France, Paris, 1991.
Chiara Santini, « Les promenades de Paris » de Charles-Adolphe Alphandpublié dans Projets de paysage le 20/07/2011 (consulté le 04/10/2014).

[Article en cours de rédaction, mis en ligne le 23 septembre 2014]



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